Login

Le designer apporte et partage ses compétences aux jardins

Minh Ta (au centre) et Margaux Degat (à droite) en présence de Thierry Sonalier, directeur général de Jardiland, et d'Hélène Fustier, propriétaire du domaine de Courson et organisatrice des journées des plantes, ont été invités à présenter leur projet (ci-contre) aux visiteurs professionnels le 16 mai dernier, à Courson-Monteloup.

PARCOURS. À 24 ans, Minh Ta a exercé ses talents de designer en approche pluridisciplinaire avec une paysagiste pour créer des jardins à Chaumont-sur-Loire (41) et à Courson-Monteloup (91).

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Minh Ta est designer. Il vient apporter son regard sur le végétal et, en parallèle, s'imprégner de la nature pour ses conceptions de sculptures et mises en scène. Des allers-retours riches en échanges, concertations et créations originales, notamment avec la paysagiste et conceptrice Margaux Degat (www.margauxdegat.wordpress.com). Ensemble, ils ont été mis à l'honneur. Une première fois avec leur Jardin de l'ivresse, réalisation saisonnière pour le concours du festival international de Chaumont-sur-Loire en 2013. Ils y ont été retenus comme meilleure équipe et meilleurs jeunes talents. Minh Ta relate : « Après ce succès, nous avons eu la chance de réaliser le jardin d'essais du onzième Observatoire des tendances du jardin (OTJ), soutenu par l'institut Jardiland, inauguré aux journées de Courson en mai dernier. »

Minh Ta n'a pas suivi de formation horticole : « Fan de Courson, ma mère m'a souvent entraîné là-bas et m'a appris le B.A.BA du jardinage. Mais ce sont surtout mes voyages en Asie qui ont eu un impact sur ma vision du végétal. J'ai pu constater à quel point la nature pouvait être importante et respectée à travers une cohabitation quasi parfaite avec l'homme, dans des villages sur l'eau ou en montagne, l'utilisation de matières organiques telles que le bambou pour réaliser divers objets, l'utilisation permanente des plantes en médecine... » Durant sa formation en design et maquette-sculpture numérique, à Strate College, à Sèvres (92), et pour son mémoire, il travaillait déjà sur l'objet et l'art en relation avec la nature, et sur l'intemporalité des créations. Aujourd'hui, ses prototypes en 3D et version numérique s'inspirent de plus en plus de la construction biologique des organismes vivants, de l'environnement. « Cette nouvelle tendance permet de mieux se faire comprendre du public », souligne-t-il.

« Nous avons voulu exprimer la transmission des savoirs et de la vie »

En 2012, il a été appelé par Margaux Degat pour le projet du Jardin de l'ivresse, à Chaumont-sur-Loire. Tous deux ont collaboré très librement, tout d'abord ensemble, puis chacun en fonction de ses compétences : « Nos approches sont complémentaires. J'ai travaillé sur les matières, la scénographie et nos échanges permettaient de valider ou de corriger mes choix. Margaux connaît le développement, donc le volume, et les exigences des plantes. »

Pour le second jardin, sur le thème de La Transmission, à Courson-Monteloup, il ne s'agissait plus d'un concours libre. « Après le succès de Chaumont, Chantal Colleu-Dumond, la directrice du Domaine, et son équipe nous ont recommandés auprès des organisateurs de Courson », poursuit Minh Ta. « Un jury composé de Caroline Pigeon, de l'agence de communication Kingcom, et de François Pauly, responsable filière 'Végétal' chez Jardiland, nous a reçus. Nous avons dû défendre chacun nos ressentis sur les végétaux, nos compétences complémentaires... Retenus parmi plusieurs équipes, nous avons travaillé en tandem, de novembre 2013 à mai 2014. Cette fois, c'était bien plus complexe car nous devions nous imprégner des idées émises par les rédacteurs du Carnet de tendances de l'OTJ. Ce n'est qu'après que nous avons pu ajouter notre vision du végétal et notre interprétation personnelle. Nous avons voulu exprimer la transmission des savoirs et de la vie. » Pour la réalisation, le terrain d'accueil étant imposé, ils ont dû tenir compte du sol, de la topographie et de l'environnement du parc. Ensemble, ils ont apporté le design, les volumes, les couleurs, la mise en scène, le mouvement, les déambulations... Minh Ta a poursuivi le projet en 3D, passant du support papier au logiciel numérique pour finaliser des visuels à l'échelle ; il a réalisé lui-même toutes les structures en atelier. Margaux a choisi la palette végétale, soit environ 2 000 spécimens.

« Au départ, je connaissais mal les plantes. Mais depuis ces deux travaux en commun, le monde du végétal m'attire. Rude parfois, c'est un beau domaine où l'on transcende le jardin. J'y ai rencontré de vrais passionnés, et j'ai plusieurs fois pu voir et entendre les visiteurs. C'est émouvant de susciter la créativité, et d'observer comment les enfants s'approprient un lieu si on leur laisse la liberté de toucher les plantes et les objets. À Chaumont, par exemple, nos oreilles d'ours (Stachys lanata) et notre sous-bois ont eu un grand succès, ainsi que nos fauteuils et notre vieux piano... Je regarde aussi le jardin comme un phénomène qui touche les grandes métropoles. Nous serons témoins d'une nouvelle ère d'espaces hybrides alliant urbanisme et nature. Mais nous ne dominerons jamais la nature. »

Actuellement designer freelance installé à Paris, Minh Ta travaille notamment à la réalisation de vitrines, avec le sculpteur et designer Arnold Goron pour la créatrice de mode Isabel Marant. Parallèlement, il poursuit dans les voies du design et de la scénographie sous diverses formes. « Je continue à m'inspirer des végétaux et de la nature dans mes sculptures. Il me semble plus difficile d'utiliser les plantes dans mes créations éphémères, mais pourquoi pas. Avec Margaux Degat, nous envisageons d'allier à nouveau nos compétences pour la réalisation de jardins ou de scénographies comme les aménagements de terrasses. »

Odile Maillard

www.minhta.fr (en cours de création)

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement